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Martin Royackers

Lorsque les Jésuites sont arrivés à Annotto Bay, au milieu des années 1880, l'un d'eux a déclaré que "Quiconque pouvait gagner sa vie ailleurs, ne venait pas s'y établir." Le sol est marécageux, infesté de moustiques; l'économie est stagnante et les récoltes des plantations sont pauvres.

Depuis 1994, le ministère des Jésuites à Annotto Bay a pris forme grâce à l'énergie inlassable et au charisme du père Martin Royackers, s.j.. Et il a été tragiquement troublé lorsque, le 20 juin 2001, une balle a transpercé le coeur, le poumon et l'épine dorsale du père Royackers, et l'a abattu à la porte de l'église. La blessure indique que l'assassin se trouvait à moins de deux mètres de sa victime.

Le père Martin était un jésuite hors de l'ordinaire et de tout moule: fumeur invétéré, mal accoutré, les bottines couvertes de boue, les cheveux en broussaille, c'est ce que l'on remarquait en premier chez lui. Mais avec un peu de patience on découvrait chez lui un sourire timide, une introversion qui démontre maladroitement un coeur compatissant, un esprit brillant et zélé. Il était "un diamant à l'état brut" pour ceux qui ne se laissaient pas distraire par les signes extérieurs.

C'est la communauté de l'église de Tinsbury, dont les fidèles se réclamaient du renouveau zioniste, qui a le plus influencé le père Martin et formé son ministère de pasteur au renouveau pentecôtiste de la religion populaire en Jamaïque. Avec son esprit pénétrant, sa maîtrise de l'anglais, sa théologie orthodoxe et son engagement dans l'inculturation, il a remodelé la messe à l'aide de rythmes du renouveau, d'hymnes et de témoignages pentecôtistes. Les paroissiens étaient profondément attentifs à ses sermons de 45 minutes. Réagissant contre l'idée qu'on ne pouvait assister à la messe sans être bien vêtu et sans porter des chaussures bien cirées, pour faire passer son message, il s'est déchaussé d'un coup de pied, et pieds nus il a continué à célébrer la messe. Quand il n'arpentait pas l'allée centrale de l'église durant ses messes du dimanche qui d'ordinaire duraient trois heures, il parcourait les sentiers abrupts des collines, visitant les fermiers, les cajolant et travaillant avec eux à améliorer leurs récoltes. Son énergie était sans bornes: il pouvait en dix minutes décharger une tonne d'engrais, sans que la sueur et la poussière le gênent. Comme le disait son ami et mentor, le père Doug McCarthy, "bien des pulsions animaient la vie du père Martin, mais surtout celle de la grâce. Seule une balle pouvait immobiliser son coeur zélé et compatissant."

Ses funérailles qui, le 28 juin, ont duré six heures, ont quelque peu rendu ce que sa vie avait d'extraordinaire. L'archevêque Samuel Carter, s.j. a présidé l'absoute et le cercueil de Martin a été déposé sur la camionette cabossée du père Martin pour la procession jusqu'au lieu de la sépulture. Le père Martin avait souvent transporté des cercueils pour des gens trop pauvres pour se payer un corbillard, et il avait demandé que, s'il mourrait en Jamaïque, il soit transporté de même. Le cercueil était entouré de deux joueurs de tambour et de 15 choristes du renouveau. Plus de douze voitures de la police (parmi les papiers sur le bureau du père Martin, il y avait une sommation de paraître en cour pour infractions au code de la route) surveillaient le trajet de sept milles jusqu'à l'endroit de la sépulture dans la montagne. Depuis le décès du père Martin, les cinq églises qu'il desservait, résonnent encore au son des tambours.

Le décès du père Martin, que certains perçoivent comme un martyre pour le Royaume, loin de refroidir l'esprit et la détermination des gens qu'il a servis et aimés, les a incités à faire davantage. Plusieurs autres ont assumé des tâches nouvelles. Deux Jésuites se sont portés volontaires pour venir en Jamaïque. L'esprit ignatien du "magis" est vivant et se porte bien.


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